Il y a peu, nous avons tous entendu parler de la vidéo de cet arriéré qui s’est fait filmé jetant un chaton contre un mur. Personnellement, je n’ai pas vu cette vidéo et je m’y refuse. Pour les mêmes raisons qui me mettent à l’écart de l’actualité en général. Mon hypersensibilité me l’interdit. Si je cédais, je vous haïrais sans exception pour tous les exemples salissants de bêtise que notre espèce peut avancer. Là, je me retiens. Même sans voir cette vidéo, en toute honnêteté, je lapiderais cet individu sans aucun remords. Afin d'être clair.
Pour me comprendre, lire mon texte pour le fanzine Trépan intitulé « L’actualité ».
Cela dit, je souhaite tout de même revenir sur cet évènement et toute une autre série d’inepties du même acabit.


Retour sur ce type et sa bêtise. Pourquoi ne pas essayer de réfléchir différemment. Posons-nous trois questions :
Comment le pseudo de cette personne est-il arrivé jusqu’à mon cortex ?
Pourquoi s’est-il filmé maltraitant un animal ?
A qui cela profite-t-il vraiment ?

Les trois réponses sont dans le titre de ce texte :
Grâce à Panosptès, ou littéralement celui qui voit tout.
Pour faire du buzz.
A ceux qui font de la toile facile ce qu’elle est majoritairement. argus_panoptes_by_qetza-d5jupqw.jpg

Mes versions de ces réponses :
Grâce à nous.
Un crétin qui jette un chaton contre un mur ça fait du « buzz » parce que nous le voulons bien (notez que je m’inclue, écrivant sur le sujet ai-je un autre choix qui soit aussi honnête ?).
Aux prochains idiots qui trouveront un acte débile pour centraliser l’attention « médiatique » sur eux.

À ce rythme, dans une dizaine d’années, peut-être aura-t-on la chance de s’offusquer devant un autre crétin qui jettera un nourrisson volé dans une maternité depuis une passerelle d’autoroute et qui filmera le tout avec son téléphone. Et, pendant quelque temps, tout le monde connaîtra le pseudo de cette vomissure humaine et il aura eu ce qu’il souhaitait. Tout comme on connait les noms de Guy Georges, Charles Manson ou Marc Dutrou (ce triptyque n'est pas choisi au hasard). Leurs pulsions pathologiques perverses sont encore assagies, pour certains, par le pouvoir conféré par leur statut de monstres médiatiques.
C’est ainsi, internet permet tout et je dis bien TOUT. Et internet et bien c’est ce fournisseur, ce moteur de recherche, ces serveurs, ces chaînes, ces profils, c’est eux, c’est vous, c’est moi, c’est nous.
Avant de se monter la morale contre la monstruosité d’un imbécile qui n’a rien trouvé de mieux que la maltraitance sur un être fondamentalement innocent pour focaliser sur lui les projecteurs, réfléchissons un peu. Touillons un peu dans notre nombril le jus de notre narcissisme primaire. Croyez bien qu’étant un fervent défenseur de la cause animale, je ne cautionnerai jamais un tel acte. Je préfère leur évidente sincérité à tout ce ramassis de fausseté humaine. Toutefois, il me semble inévitable de replacer le problème dans son contexte pour en comprendre les causes. Quand bien même cela me mettra-t-il dans le même sac que des personnes que j’exècre vraiment.

Soyons contemporains, profitons de tous ces outils pour faire parler de nous. L’immortalité partout, je dis oui ! C’est beau ! L’immortalité pour tous ! On en rêve, on l’a à portée de clavier, d’objectif, de portable, de branlette technologique, d’applications pour ego affamés. L’immortalité numérique pour cette écervelée à gros nibards qui occupe le devant de vos scènes (désolé, je ne peux que m’exclure là, je n’ai jamais participé à ça) avec ses expressions déposées pour futilité consommable partout. Pour ce comique tristement contaminé qui cause antisémitisme et va servir de témoins de mariage à des meurtriers pour qu’on rajoute un peu de blabla moralisateur et vomitif sur son compte. Pour l’ensemble de ces êtres qui se filment pour mettre en avant un talent qu’ils n’ont pas. Pour tous les malades sociaux de l’univers à qui maman a oublié de faire un bisou. Pour moi qui écris un blog pour faire de son écriture autre chose qu’un produit payant.

C’est nous tous qui avons jeté ce chaton contre ce mur, nous tous qui avons jeté ce chien d’un toit d’immeuble en Égypte, nous tous qui avons écrasé cette petite chinoise avec notre camion, nous tous qui permettons à de la soupe à la merde d’arriver jusqu’à nos tympans, nous tous qui produisons ces films indécemment coûteux pendant que des gens meurent de faim, nous tous qui brisons les tabous les plus évidents pour notre quart d’heure de gloire. À chaque fois que vous cliquez, que vous « likez », que vous « followez » (l’anglais ça simplifie toujours, c’est une langue pauvre, parasite et, visiblement, indice de la bêtise. J’y reviendrai dans un autre texte.), que vous « postez » (un « post », désolé, je ne me trompe pas on est loin du « post » latin...anglicisme encore) vous soulevez doucement la trappe du narcissisme d’un autre et faites entrer la lumière où il souhaitait la voir pénétrer. De plus, vous permettez à d'autres d'envier ce résultat...

Personnellement, ça me déborde. Je n’en peux plus de constater de façon récurrente la triste étendue de l’ineptie sociale. « Non, non, moi je ne peux pas la blairer l’autre conne avec ses gros nibards » Si elle a si peu d'intérêt, pourquoi tu m'en parles? Pourquoi on vient me coller son prénom dans le crâne? Ah oui, uniquement son prénom parce que l’individu du « buzz » (tiens donc, un autre anglicisme, c’est vrai que le français est une langue si pauvrement nuancée qu’elle n’avait pas de terme équivalent) n’est pas une personne à part entière. Il échange son nom contre un pseudo ou en coupe la moitié comme dans le dernier cas cité où elle n’est plus qu’un prénom (et, par cette fabuleuse astuce, s’extrait au domaine du commun en vous donnant l’illusion de l'inverse).
Pour faciliter les choses, je nommerai ces semi-individus des buzzités.
Je disais donc, les buzzités on les aime...on les like (veuillez m’excuser, faute de goût), on les partage, on les diffuse, néanmoins on se refuse à les cautionner dès lors qu’elles franchissent des limites encore bien floues pour moi. Aidez-moi donc s’il vous plaît.
Quelle différence entre une idiote qui influence et abrutit toute une génération et un sombre crétin qui jette un chaton contre un mur ? On est bien d’accord, vous connaissez les deux et vous en parlez ? Ce sont des buzzités comme souhaitent le devenir myriade d’autres délaissés de l’attention du monde. En reprenant leurs singularités appauvrissantes, en évoquant leurs actes ne serait-ce que dans une simple discussion et en consommant toutes les autres aberrations offertes par les médias qui vous ont apporté ces merveilles et bien vous servez de vecteurs. Vous êtes partie du problème. Pardon, nous sommes partie du problème. Je suis revenu au « vous » sans le vouloir, désolé, dans l’immédiat je suis trop (sensible, lâche, malhonnête etc Choisissez le qualificatif qu’il vous plaira, m'en moque) pour m’accepter dans l’équation. Déresponsabilisation chérie.
334ebd4321_Araneus_diadematus.jpg S’il vous plaît, c’est une supplique honnête et désespérée, arrêtez de prendre pour argent comptant ce que vous recevez dans l’ensemble de ce qui est diffusé. Pitié, stoppons de croire à tout dans les périodes les plus adéquates. Pitié, ouvrez vos yeux et plus vos culs (voilà, c’est dit, on était à rien, à un "soupe à la merde", du pamphlet, on vient de passer dans la catégorie weblog...ah ouais, mais en fait...).
Dernière supplique avant de vous lâcher dans cette jungle plastique sous LCD, arrêtez de croire que vous n’avez pas le choix. C’est le plus important.
Servez-vous de votre antenne télé pour battre les gens de TFmachin, prenez votre radio et jetez là sur Nabila (et voilà, merci à l’ensemble des gens que j’ai entendu parler d’elle) et dépouillez votre vendeur de journaux pour aller vous acheter des bouquins chez un libraire. Même un Lévy ça ira.

Pour en finir. Mater une abeille se faire becqueter par une araignée sous les caméras d’un réalisateur pervers, personnellement ça me colle des frissons. Et vous ? Masturbation ou dégoût ?